Face à la flambée des prix de l’énergie et à l’urgence climatique, des milliers de foyers français scrutent désormais à la loupe la moindre offre d’électricité verte. Deux noms, GreenYellow – filiale historique du groupe Casino – et Enercoop – pionnier coopératif né en 2005 – reviennent sans cesse dans les comparateurs. Tous deux promettent un courant plus propre, des certificats verts en béton et, surtout, des économies palpables sur la facture. Pourtant, sous des slogans similaires se cachent des philosophies, des modèles économiques et des niveaux d’impact environnemental radicalement différents. Cet article décortique huit grands thèmes : origines des kWh, tarification, services numériques, gouvernance, cas pratiques… Objectif : transformer la jungle des arguments commerciaux en critères clairs pour une consommation responsable. Que l’on habite un studio connecté à Paris ou une longère rurale équipée de panneaux solaires, il sera enfin possible d’arbitrer sereinement entre ces deux fournisseurs d’énergie emblématiques – et de s’équiper d’outils malins pour accélérer sa propre transition énergétique.
Décrypter l’ADN de GreenYellow et d’Enercoop pour comprendre leurs offres
Une histoire de naissance et d’objectifs divergents
GreenYellow voit le jour en 2007 dans le giron du groupe Casino avec une feuille de route très corporate : réduire les coûts énergétiques des hypermarchés de l’enseigne et investir sur le marché de l’économie d’énergie. Rapidement, la société diversifie ses revenus : installation de toitures photovoltaïques, autoproduction pour tiers, efficacité énergétique clé en main. En 2025, l’entreprise totalise plus de 500 MW de capacité solaire installée et 2 000 contrats de services dans 18 pays. L’électricité qu’elle revend aux particuliers provient en partie de ses fermes photovoltaïques françaises, en partie d’achats sur le marché couplés à des garanties d’origine. Sa promesse ? Un tarif souvent inférieur au Tarif Bleu d’EDF grâce à l’optimisation de ses centrales solaires amorties.
À l’opposé, Enercoop naît d’une intuition militante : il faut un fournisseur détenu par ses clients et producteurs pour assurer, de la prise au parc éolien, la traçabilité de l’électricité verte. Statut choisi : la Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC). En 2025, elle rassemble 120 000 sociétaires et 450 producteurs partenaires contractuellement dédiés, alimentant 100 % du kWh vendu. Aucune spéculation boursière ni trading de certificats verts issus de l’hydraulique norvégienne : uniquement des contrats directs, souvent sur 15 ans, permettant de sécuriser l’investissement local dans de nouvelles énergies renouvelables.
Sources d’énergie : panorama illustré
- 🌞 GreenYellow : 68 % solaire (fermes au Portugal, dans l’Aude et la Réunion), 19 % hydraulique acheté à des producteurs indépendants, 13 % autre (biomasse + éolien).
- 🍃 Enercoop : 46 % éolien citoyen (parcs de l’Aveyron, de l’Allier), 31 % hydroélectricité de petite chute (<10 MW), 22 % solaire de toitures et ombrières, 1 % biométhane cogénéré.
Cette différence structurelle se répercute sur la stabilité de prix : quand le soleil se fait rare, GreenYellow réinjecte du kWh de bourse pour équilibrer. Enercoop assume quant à elle un prix du kWh parfois plus haut mais quasi fixe, le surcoût finançant directement de nouveaux projets EnR.
Tableau comparatif des indicateurs clés (2025)
Indicateur 📊 | GreenYellow | Enercoop |
---|---|---|
Capacité de production propre | 500 MW (principalement solaire) | 750 GWh achetés en contrats directs |
Taux de couverture par production maison | ≈ 55 % | 100 % |
Part des GO étrangères | 12 % | 0 % |
Statut juridique | SAS (filiale Casino) | SCIC (coopérative) |
Clients particuliers | 220 000 | 140 000 |
➡️ L’insight final : avant même de parler euros, la question fondamentale est celle du degré d’alignement entre sa sensibilité écologique et le modèle capitalistique du fournisseur. Un consommateur exigeant sur la traçabilité plébiscitera Enercoop ; celui misant sur un prix compétitif sans sacrifier entièrement la verdisation peut considérer GreenYellow.
La suite examinera comment ces différences structurelles impactent la facture et la création de valeur locale.
Analyse des modèles économiques : du kWh au partage de valeur locale
Les flux financiers chez GreenYellow
Le modèle GY repose sur trois piliers : vente d’énergie, services d’efficacité et financement de projets en tiers-investissement. Concrètement, lorsqu’un particulier souscrit un abonnement, 62 % de la marge brute paie le sourcing électrique, 23 % finance l’exploitation des centrales existantes, 9 % nourrit la R&D et 6 % couvre la rémunération des actionnaires du groupe Casino. L’économie d’énergie est monétisée via des contrats de performance : si le client maison, la chaîne Géant Casino Bercy par exemple, baisse sa consommation, GreenYellow récupère une prime CEE revendable.
Les flux financiers chez Enercoop
Dans la coopérative, la répartition est radicalement différente : 82 % du prix du kWh rémunère directement un producteur EnR en contrat PPA, 12 % couvre les frais de fonctionnement (salaires coopérateurs, hotline, développement open source), 4 % est placé en fonds de développement pour de nouveaux parcs, 2 % constitue une réserve impartageable. Aucun dividende externalisé : le sociétariat vote la redistribution sous forme de baisse de prix ou d’investissement.
- 🛠️ Exemple concret : en 2024, la coopérative a investi 2 M€ dans le parc éolien citoyen de Lombron (Sarthe) financé à 40 % par les sociétaires locaux et à 30 % par un prêt participatif.
- 📈 Côté GreenYellow, un parc solaire de 17 MW dans le Gard a été cédé 51 % à un fonds d’infrastructure canadien, générant une plus-value de 8 M€ pour la maison-mère.
Retombées socio-économiques territoriales
Les deux acteurs communiquent sur l’emploi : GreenYellow revendique 1 200 ETP dont 450 en France ; Enercoop 320 ETP mais 1 500 emplois indirects chez ses producteurs. La différence se joue sur la gouvernance : la SCIC impose qu’un administrateur issu des collectivités siège au conseil national, garantissant que le ROI social prime sur le ROI financier.
➡️ L’insight final : la somme payée chaque mois ne finance pas la même chaîne de valeur. Le client qui veut que son argent reste dans l’économie locale privilégiera Enercoop ; celui qui cherche une solution clé en main “one-stop-shop” incluant panneaux + rachat d’énergie se tournera vers GreenYellow.
Regardons désormais comment ces stratégies se traduisent en émissions évitées et en garantie de transition énergétique.
Comparaison des impacts environnementaux : au-delà des certificats verts
Émissions de CO₂ évitées
Selon l’ADEME, 1 kWh issu de l’hydraulique français évite 77 g CO₂ par rapport au mix européen. En 2025, les 750 GWh fournis par Enercoop ont permis d’éviter 57 000 t de CO₂. GreenYellow, grâce à son mix dominé par le solaire, affiche 110 000 t évitées sur un volume deux fois plus important (1,4 TWh), mais 14 % de ce kWh provient du marché spot parfois carboné. Après correction, l’évitement ramené au kWh est de 45 g.
Le casse-tête des certificats verts
GreenYellow achète encore 180 GWh de garanties d’origine norvégiennes à bas coût pour labelliser une partie de son offre “Smart Vert+”. Enercoop refuse cette pratique et milite pour introduire un “GO local” incompatible avec le trading international. Pour éclairer ce débat :
- 🗺️ Les GO scandinaves coûtent 0,10 €/MWh contre 1,20 € pour des GO françaises post-2015.
- ⏳ La traçabilité administrative n’égale pas la preuve physique : les électrons se mélangent, seul le financement du parc compte.
- ⚖️ Le label VertVolt “Choix très engagé” exige l’achat conjoint énergie+GO en France, critère rempli par Enercoop mais pas par toutes les offres GreenYellow.
Étude de sensibilité : scénario extrême
Imaginez un hiver rigoureux où le photovoltaïque chute de 30 %. GreenYellow importerait davantage sur le marché de gros, augmentant de 8 % l’intensité carbone de son mix. Enercoop, liée contractuellement à ses producteurs, compenserait avec l’hydraulique de ses barrages alpins, intensité quasi nulle. Le surcoût serait répercuté via une petite hausse du prix, mais l’impact environnemental resterait maîtrisé.
- 🔍 Conseil pratique : consulter chaque année le “document d’information sur la composition de l’énergie” fourni sur la facture pour vérifier l’évolution des GO.
- 📚 Pour approfondir, l’article sur les stratégies d’EDF et TotalEnergies en énergies renouvelables offre un panorama des grands acteurs du certificat.
➡️ L’insight final : quand on achète un kWh, on achète surtout un modèle de financement. Les GO seuls ne suffisent pas ; il faut regarder le pourcentage de contrats directs et la politique d’importation sur le marché spot.
Après l’écologie, place au portefeuille : comment ces différences se traduisent-elles en euros ?
Tarifs, factures et astuces pour réaliser une vraie économie d’énergie
Grilles tarifaires comparées en 2025
Pour une maison tout-électrique de 6 kVA (5 000 kWh/an), la facture annuelle TTC s’établit en moyenne à :
- 💸 GreenYellow “Offre Flex Solaire” : 1 035 € (-6 % vs Tarif Bleu)
- 💚 Enercoop “Classique Coopératif” : 1 120 € (+2 % vs Tarif Bleu)
La différence provient essentiellement du prix de l’abonnement : 150 € chez GreenYellow contre 205 € chez Enercoop. Le kWh lui est quasiment similaire (0,207 € vs 0,209 €) grâce à la baisse des coûts EnR.
Le rôle des outils d’optimisation
GreenYellow propose l’application “GY Dashboard” : suivi 30 min, alertes dépassement, simulation d’ampérage. Enercoop mise sur “eco2mix coop”, un portail open source branché sur la base RTE et un coach sobriété. En moyenne, les utilisateurs actifs économisent 11 % de kWh la première année.
- 📱 Astuce : activer les notifications de dépassement d’usage le soir pour détecter une plaque de cuisson défectueuse.
- 🌙 Activer l’option Heures Super Creuses exclusive GreenYellow peut faire descendre le kWh à 0,145 € entre 2 h et 6 h.
Intégrer l’autoconsommation
GreenYellow installe des kits 3 kWc à 7 990 €, maintenance incluse 10 ans, rachetant le surplus 0,13 €/kWh. Enercoop se place en acheteur de surplus à 0,12 € mais encourage le dimensionnement pour 70 % d’autoproduction plutôt que la vente. Un partenariat avec SMA/Fronius – détaillé ici sur les onduleurs solaires – garantit un rendement optimisé.
➡️ L’insight final : la facture dépend presque autant du comportement utilisateur que du fournisseur. Un foyer qui installe 3 kWc, valorise les heures creuses et surveille sa conso peut gommer l’écart de prix initial.